Il paraît que le courrier, c’est encore mieux l’après-midi

Une distribution après dîner satisfait une majorité de clients. C’est ce que semble montrer un test mené dans le canton de Vaud. Le géant jaune veut maintenant aller plus loin en automatisant le tri.

Patrick Chuard / Ron Hochuli | 04.07.2009 | 24 Heures

«Je pensais que ça allait m’énerver… Mais non, finalement ça ne me dérange pas du tout.» Simone Félix reçoit son courrier postal au début de l’après-midi depuis quelques mois. Après une tournée matinale pour les journaux, le facteur repasse après 13 h pour déposer le reste dans sa boîte. Tout le quartier résidentiel de Simone, à Epalinges, subit ce régime de distribution en deux temps. Un test grandeur nature mené depuis l’an dernier par La Poste (dans des zones résidentielles à Lausanne, à Epalinges et à Montreux) en attendant son application éventuelle dans toutes les zones urbaines du pays.

Test réussi, selon le géant jaune: 43% des usagers se disent satisfaits, affirme un sondage, alors que 23% n’ont pas d’opinion. Un tiers des usagers souhaite le retour à l’ancien horaire – en majorité des retraités. Selon le même sondage, près de la moitié des clients n’auraient même pas remarqué le changement d’horaire…

Feu vert pour une généralisation? Pas si vite! «Nous devons procéder à une analyse globale», dit Nathalie Salamin, porte-parole de l’entreprise. Surtout, cette évolution prévoit d’autres nouveautés: La Poste envisage désormais de trier automatiquement le courrier. Un test, là aussi en grandeur nature, va être mené ces prochains mois à Gossau.

Économies en vue
Le tri des enveloppes par une machine promet un gros potentiel d’économies. La Poste n’avance pas de chiffres. Mais son directeur Michel Kunz se voulait clair à ce sujet, hier à Berne: «Sans cette solution la question d’une hausse des tarifs se posera». Selon un observateur «des centaines d’emplois pourraient se révéler superflus» avec ces changements que La Poste pourrait généraliser d’ici à trois ans. Officiellement, sans licenciements à l’horizon. «Nous avons une responsabilité sociale et nous voulons apporter une contribution en cette période de crise», affirme Claude Béglé, président du conseil d’administration. Le Syndicat de la communication affiche son inquiétude. Mais sans hurler au loup: «Une livraison tardive du courrier n’est pas une entorse grave au service universel, concède Didier Page, vice-président du syndicat. Sur l’emploi, il est trop tôt pour dire si cela va changer. Car livrer séparément journaux, courrier aux entreprises et courrier aux privés multiplie les tournées des facteurs.»

Gros défi
Cette réalité a forcé les centres de distribution vaudois en test à effectuer quelques acrobaties ces derniers mois. «C’était un gros défi de trier à temps les journaux le matin, admet Albert-Henri Chabloz, responsable de distribution pour le Grand-Lausanne. Mais le personnel a pu profiter d’horaires moins matinaux et plus pratiques.»

A l’autre bout de la chaîne, chez les usagers, les avantages ne sautent pas aux yeux de tout le monde. «Ce n’est pas normal de livrer si tard, s’insurge Solange Gerock, d’Epalinges. Je l’ai dit à la factrice, elle m’a répondu que je n’avais qu’à prendre une case postale. Vous vous rendez compte?» Olivier Feihl, administrateur d’une PME au rez-de-chaussée de l’immeuble, hausse les épaules, fataliste: «Bien sûr que ça m’embête, ma secrétaire à mi-temps travaille le matin. Pour le courrier du jour, c’est fichu. Mais les facteurs sont sympas, je ne vais pas les accabler.»

Les envois postaux en chute libre

Le bénéfice de La Poste va fondre. A l’occasion de leurs 100 premiers jours à la tête de l’entreprise, le président du conseil d’administration, Claude Béglé, et le directeur général, Michel Kunz, ont livré des estimations, hier. Le bénéfice devrait reculer de 27% par rapport à 2008 et se situer entre 550 et 600 millions. Parmi les indicateurs les plus inquiétants, la baisse des recettes issues du courrier. L’ouverture du marché postal (le monopole demeure pour les lettres jusqu’à 50 grammes depuis le 1er juillet) aura des conséquences. Moins à cause de la concurrence, à court terme, que parce que le géant jaune est désormais soumis à la TVA. En outre, le volume du courrier baisse rapidement. Pour 2009, la baisse escomptée est de 5% au moins. Le secteur courrier ne devrait rapporter cette année que 94 millions (249 en 2008). Il faudrait par ailleurs s’attendre à une baisse de 30 à 40% des envois d’ici à 2015.

Si les tarifs du courrier ne devraient pas augmenter avant 2011, La Poste mise toujours davantage sur PostFinance en matière de revenus: 350 millions cette année (229 en 2008). Les dirigeants plaident toujours et encore pour une licence bancaire, malgré les refus politiques. «Nous serons toujours moins une entreprise logistique et toujours davantage un prestataire de services financiers. Sans la licence, nous élargirons notre offre via des partenaires bancaires», a souligné Claude Béglé.

R. H.

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