Les transports en commun gratuits, une utopie ?

La communauté d’agglomération du pays d’Aubagne a mis en en place il y a deux ans un service de transports en commun totalement gratuit . Une fréquentation record et un service apprécié par les usagers. Les résultats d’une enquête sociologique qui tente de mesurer l’impact qualitatif du passage à la gratuité, pour savoir ce que les habitants en pensent vraiment. Car en dehors de l’aspect écologique, la gratuité aurait un impact non négligeable sur la vie sociale.

Mais d’autres villes moyennes ont un système de transports en commun gratuit; comme Colomiers (près de Toulouse) pionnière dans les années 70, puis Compiègne (Oise), plus récemment, Vitré (Ille-et-Vilaine), Châteauroux et Issoudun (Indre), Mayenne (Mayenne), Gap (Hautes-Alpes), Bar-le-Duc (Meuse), Cluses (Haute-Savoie)

A Aubagne, au bout de seulement 6 mois, le système de comptage automatique des passagers attestait d’une hausse de 70% de voyageurs transportés en plus sur les lignes régulières.

Ce projet, intitulé « Liberté, égalité, gratuité », a été mis en place dans le cadre d’un travail important de concertation avec la population. Il a eu un impact très positif au niveau du lien social et de la mobilité. Il a généré une réappropriation du centre ville par des personnes habitant la périphérie (femmes avec enfants, personnes âgées…) et pour qui le coût d’un abonnement représentait une somme trop élevée à payer en une fois en début de mois. Les commerces du centre ville sont beaucoup plus fréquentés, de même que le parc ou la piscine. Les transports collectifs deviennent eux-mêmes des lieux de socialisation, d’échange, de rencontre…

« On pense souvent que ce qui est gratuit n’a pas de valeur, remarque le sociologue Alain Mergier. Or, pour les habitants que nous avons interviewés, la gratuité produit un effet de valorisation des transports en commun et du territoire de l’agglomération. » Désenclavement des villages, stimulation des activités marchandes et non marchandes, présence de piétons dans les centres-villes: le sociologue évoque la mise en place d’un cercle vertueux. Comme les transports sont gratuits, on les prend plus, ce qui permet de réanimer le territoire, en invitant les habitants à se mélanger plus souvent. Ainsi, 80% des usagers considèrent que la gratuité a rendu l’utilisation des bus plus conviviale.

Les plus satisfaits sont les jeunes utilisateurs, qui représentent près de 32% des nouveaux usagers. « Ils ont l’impression que cette mesure a été prise pour eux et que c’est un cadeau qui a un impact immédiat en termes financiers et en termes d’autonomie », juge le sociologue. Une solution à la question des incivilités dans les transports, qui font régulièrement la une des médias? Même si aucun chiffre ne peut pour l’instant l’attester, aucune augmentation des incivilités ne semble avoir été constatée et les conducteurs de bus se diraient « soulagés ». Par ailleurs, les élus peuvent se réjouir: l’enquête révèle que le choix de passer à la gratuité est vu comme une manifestation de « courage politique », avec une sensation de « savoir où va l’argent public »

La question de la gratuité

Ainsi, 67% des interviewés estiment que la gratuité est possible grâce à la bonne gestion de l’agglomération et à l’accroissement des ressources provenant des entreprises. Du côté des élus, on assure d’ailleurs que la mesure n’a pas eu d’impact sur l’imposition des contribuables, le passage à la gratuité étant en partie financé par le versement transport entreprise. Certes, les entreprises de plus de dix salariés ont du faire face à une forte augmentation de cette taxe, une hausse qui accompagne en fait l’évolution démographique de l’agglomération, qui a récemment dépassé les 100 000 habitants. « Mais celle-ci est compensée par une baisse de la taxe professionnelle », nuance Alain Belviso.

L’impact écologique.

A priori, on pourrait déjà noter une réduction du trafic automobile, car 18% des personnes interrogées expliquent qu’elles n’auraient pas pris le bus s’il n’était pas gratuit, et parmi elles, 63% auraient utilisé un moyen de transport « polluant ».

La gratuité en chiffres:

* 2 968 650 voyageurs transportés entre le 15 mai 2009 et le 31 mars 2010
* + 90% de fréquentation au premier trimestre 2010 (par rapport au premier trimestre 2009)
* 88% des usagers satisfaits de la gratuité des transports
* 20% de nouveaux passagers
* 18% des usagers n’auraient pas pris le bus s’il n’était pas gratuit, 63 % choisissent d’abandonner un véhicule plus polluant
* 12 millions d’euros consacrés aux transports en commun dans le budget de la CPAE, contre 10 millions avant la gratuité
* 5 millions d’euros de taxe « Versement transport » prélevée sur les entreprises de plus de 10 salariés, contre 2 millions avant la gratuité.

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