En voulant privatiser son service de sécurité, le transporteur fâche le puissant syndicat des cheminots
Une nouvelle crise couve entre les CFF et le syndicat des transports SEV. Il y avait déjà eu des tensions l’été dernier suite à l’accident de Granges-Marnand. Cette fois, la lutte contre les voleurs et perturbateurs dans les trains est au cœur de la dispute. Le transporteur veut en effet externaliser son «service de sécurité».
Une décision qui touche une cinquantaine de collaborateurs patrouillant essentiellement dans la région zurichoise, mais dont une dizaine sont basés à Lausanne pour les RER vaudois et genevois. En dénonçant dans son journal interne à la fin du mois dernier cette privatisation, le SEV a surtout mis en lumière la complexité du système de sûreté mis en place par l’ancienne régie.
Manque de coordination
Les agents touchés par la mesure n’appartiennent pas formellement à la récente Police des transports CFF. En outre, le transporteur fait encore appel à plusieurs entreprises privées de sécurité, dont sa filiale à 51%, Securitrans. «Par manque de coordination, cela m’est arrivé de voir dans un même train six agents différents», affirme Jean-Philippe Schmidt, porte-parole des CFF. Un constat à l’origine, selon lui, du lancement du projet One Security, celui qui prévoit d’externaliser le Service de sécurité pour simplifier l’organisation.
Pour le secrétaire syndical du SEV, Jürg Hürni, l’entreprise cherche surtout à faire des économies. «C’est un très mauvais calcul pour le service aux voyageurs. Les agents du Service de sécurité sont formés pour les renseigner et les aider, tout en effectuant des tâches de prévention.» C’était d’ailleurs leur première mission jusqu’en 2011. A ce moment-là, ils ont dû apprendre le maniement du spray au poivre pour passer sous les ordres de la nouvelle police ferroviaire, composée, elle, d’agents ayant suivi une formation de policier et autorisés à porter une arme à feu.
Ces vrais policiers auraient demandé la tête de ceux qui seraient considérés, dans une ville, comme des assistants. «Si le Service de sécurité dérange deux ou trois dirigeants de la police ferroviaire, il suffit de le rattacher ailleurs dans l’entreprise», peste Jürg Hürni. Le syndicaliste n’a d’ailleurs pas digéré l’intervention d’un autre syndicat: la Fédération suisse des fonctionnaires de police. Cette dernière à écrit aux CFF pour demander la suppression de leur Service de sécurité.
Conflit culturel?
L’affaire se corse encore depuis l’annonce, la semaine dernière, de la démission mystérieuse du chef de la police ferroviaire, Harry Wessner. Selon plusieurs sources, les dirigeants des CFF auraient un peu trop fait confiance aux dirigeants de leur nouvelle police. Après tout, les questions de gestion de la sécurité publique ne sont pas au cœur de l’activité du transporteur.
Pour les mêmes observateurs, rares sont les cheminots à être conscients que les policiers ferroviaires appartiennent à la même entreprise. Quant aux gendarmes du rail, ils peineraient à s’intéresser à la culture ferroviaire, contrairement à leurs collègues du Service de sécurité. Les CFF arriveront-ils à éviter un conflit fratricide entre leurs cheminots et leurs policiers?
Par Mehdi-Stéphane Prin le 04.03.2014, Tribune de Genève
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