Cinq conseillers d’Etat ont défendu hier l’initiative en précisant qu’il n’y a pas de plan B en cas d’échec
«Faites-vous davantage confiance à une armée de mercenaires ou à une armée de milice?»
C’est en ces termes que Mauro Poggia, chef du Département genevois de l’emploi, des affaires sociales et de la santé, a présenté l’alternative posée par l’initiative pour une caisse publique qui sera votée le 28 septembre. S’exprimant hier au nom de la Conférence latine des affaires sanitaires et sociales (Class), le ministre MCG a estimé que «l’initiative est la seule solution permettant de rendre aux citoyens les clés de la maison santé».
Pour le Genevois, l’enjeu est d’éviter que les primes progressent dans une mesure telle que, dans quelques années, les caisses pourront imposer facilement une réduction du catalogue des prestations et la fin du libre choix du médecin.
Sélection des risques
Son homologue Pierre-Yves Maillard réfute l’argument de la complexité opposé à la caisse publique. Avec une soixantaine d’assurances et quelque 300 000 primes, c’est le système actuel qui est «antirationnel et antiéconomique». Pour le Vaudois, la concurrence qui devrait porter sur la qualité des prestations s’exerce uniquement sur les primes et pousse à la sélection des risques. «L’amélioration de la compensation introduite en 2012 ne fonctionne pas», estime-t-il. Le ministre s’appuie sur la hausse des primes en 2015, qui s’échelonne entre 1 et 14% dans son canton.
Selon Pierre-Yves Maillard, l’évolution actuelle pourrait conduire à ce que les soignants deviennent les agents involontaires de la sélection des risques. Aujourd’hui déjà, ils ont toutes les peines du monde à se faire rembourser par certaines caisses. A terme, ils pourraient être tentés de refuser de soigner ces assurés.
Comme un cinéma en feu
Directeur du Département neuchâtelois des finances et de la santé, Laurent Kurth a comparé le système à un cinéma en feu: «Si chacun ne songe qu’à soi, c’est l’émeute. Le but de la caisse publique, c’est de sortir en bon ordre.» Au-delà de l’image, une caisse publique permettra de mettre sur pied des programmes sérieux de prévention et de suivi des patients. Actuellement, les assureurs n’y ont aucun intérêt.
«La caisse publique apportera aussi un supplément de sécurité en évitant que des données ne soient transmises au secteur de l’assurance complémentaire», a souligné la Fribourgeoise Anne-Claude Demierre. Interrogés sur un éventuel plan B en cas d’échec, les ministres jugent irréaliste la création d’une caisse publique romande: elle serait en concurrence avec les caisses privées et devrait recourir aux mêmes artifices pour baisser ses primes.
Laurent Aubert
Nuances dans l’unité
La Conférence latine des affaires sanitaires et sociales (Class) est rarement sous le feu des projecteurs. «C’est la première fois qu’une majorité de ses membres apparaît ainsi devant la presse», a souligné son président, Michel Thentz. Si le Jurassien était flanqué de ses collègues vaudois, genevois, fribourgeois et neuchâtelois, trois fauteuils cantonaux sont restés vides. Philippe Perrenoud (BE) souhaite ne pas s’engager dans la compagne car il préside la Conférence des directeurs de la santé (CDS) qui a pris position contre l’initiative. Esther Waeber-Kalbermatten (VS) ne s’engage pas non plus dans le débat «mais j’explique ce qui ne fonctionne pas et ce qu’il faut changer» en cas de question. Enfin, Paolo Beltraminelli (TI) est opposé à la caisse publique.
L.AU.
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