Alors que les CFF accumulent les avantages destinés aux usagers, une hausse générale des tarifs de 3% est annoncée pour décembre.Ironie du sort, les deux nouvelles tombent à une journée d’intervalle.
D’une part, l’Union des transports publics (UTP) confirme que les prix devraient augmenter de 3% sur le réseau dès décembre 2016. Cette hausse sera différenciée selon les abonnements et billets, mais les prix définitifs ne sont pas encore connus. De l’autre, les CFF annonçaient mardi une vaste opération afin de compenser la hausse des prix de 2014. Car la nouvelle tarification rapporte, depuis, 29,3 millions de francs annuels en trop pour l’exploitation des grandes lignes, le trafic régional étant, lui, plutôt déficitaire.

Pour compenser ces presque 30 millions, les CFF et le surveillant des prix ont mis plusieurs mesures en place: les billets dégriffés, qui permettent à chacun de voyager à des prix particulièrement bas hors des heures de pointe. Ces billets n’ayant pas trouvé autant de preneurs qu’escompté, et toujours en accord avec Monsieur Prix, les CFF ont alors envoyé des bons de 10 francs adressés personnellement aux 2,3 millions de détenteurs de demi-tarif.

Des cadeaux complexes
Quelques mois plus tard, ces mesures n’ont pas suffi à éponger les 30 millions, d’où l’annonce de 100 000 cartes journalières (un peu plus de 93 000 selon nos informations) valables dès 9 h du matin, vendues à moitié prix. Là encore, la mesure ne touche que les détenteurs du demi-tarif.

N’aurait-il pas été plus simple de ne pas augmenter autant les tarifs en 2014? «Nous n’avons pas vraiment compris pourquoi cette formule aussi compliquée a été préférée», explique Beat Niederhauser, chef de bureau à la surveillance des prix. Qui précise: «L’UTP ne souhaitait pas toucher au système actuel de ventilation des prestations. Nous sommes là pour organiser des accords à l’amiable, nous n’allions pas leur forcer la main.» D’où cette suite de mesures et de ristournes.

Un calcul très strict
Un cadeau de 100 000 cartes à moitié prix, au vu du nombre d’utilisateurs, est-ce bien suffisant? «Comparé aux 2,3 millions de demi-tarifs, ce chiffre est plutôt faible, c’est vrai. Mais il résulte d’un calcul très strict, car il devait correspondre au montant précis que les CFF devaient «rembourser», complète le suppléant au surveillant des prix.

Aux CFF, cette stratégie n’est pas jugée particulièrement compliquée. Elle permet, au passage, de réduire les pics de fréquentation en encourageant les voyageurs à prendre le train après 9 heures. Donatella Del Vecchio, porte-parole des CFF, souligne que les lignes régionales avaient besoin d’une hausse des tarifs et que la redistribution des recettes est une mécanique complexe. «Ces mesures ont été convenues avec l’ensemble de la branche des transports publics. Il fallait trouver un moyen de rendre les recettes enregistrées sur le trafic des grandes lignes, d’où l’accord avec le surveillant des prix.»

Hausses critiquées
Cadeaux d’un côté et hausses des tarifs de l’autre? La Fédération romande des consommateurs (FRC) approuve les premiers et dénonce les secondes. «Tout comme lors de la distribution de bons de 10 francs, nous nous réjouissons des effets de la surveillance des prix. Ce retour d’argent est plutôt positif, heureusement que M. Prix est là pour le négocier», commente Robin Eymann, responsable de la politique économique auprès de la FRC. «Mais il aurait été préférable d’éviter de trop augmenter les billets à la base.»

Revenant sur la hausse des prix de 3% en moyenne, soit 100 millions par an, l’organisation de défense des consommateurs déplore qu’elle ne serve pas à obtenir davantage de prestations, mais uniquement à compenser un prix au kilomètre devenu plus cher sur décision du Conseil fédéral. Admettant que «les transports publics ne couvrent pas leurs coûts», la FRC dénonce malgré tout la logique visant à ce que «le voyageur paie à la place des pouvoirs publics». I

Le Courrier, 03 mars 2016, Laura Drompt