Les propos étranges du président

Peter Hasler estime qu’il est temps d’augmenter le prix du timbre en courrier A et courrier B. La FRC s’étonne fortement de ces propos.

Augmenter le prix du timbre-poste. C’est l’idée lancée par le président du géant jaune, Peter Hasler. «Le marché du courrier demeure rentable, mais uniquement grâce à la clientèle commerciale», expliquait-il dans les colonnes des quotidiens alémaniques Tages-Anzeiger et Bund. «Pour les particuliers, les lettres sont trop bon marché.» Ampleur de la hausse: 1 franc en courrier «B» au lieu de 85 centimes, et 1,20 franc en courrier «A» plutôt que 1 franc actuellement. Des montants qui parviendraient à compenser le fait que, selon les régions où elle achemine le courrier, La Poste ne parvient pas à couvrir ses coûts.

Propos étonnants
Pas de plan concret en ce sens pour l’heure, précise une porte-parole du géant jaune. Mais une «hypothèse de travail» que Peter Hasler juge «réaliste». D’autant que La Poste n’a pas adapté les tarifs du courrier depuis plus de dix ans. Et que le volume des lettres et des colis déposés ne cesse de reculer. Face à cette érosion, péjorée par la baisse des paiements au guichet, le géant jaune avait déjà annoncé mi-mars vouloir renforcer le réseau de guichets virtuels, au détriment des guichets physiques. En présentant un résultat net en hausse pour l’an dernier, à 645 millions de francs, le président de La Poste avait jugé inacceptable que le marché de la clientèle privée soit déficitaire.

Ces tarifs postaux sont fixés sous la surveillance de Monsieur Prix, dans un accord qui arrivera à échéance ce printemps. Alors seulement La Poste réévaluera la situation, précise le géant jaune. Une tâche qui incombera selon toute vraisemblance au Fribourgeois Urs Schwaller. L’ancien conseiller aux Etats PDC devrait être élu aujourd’hui lors de l’assemblée générale du géant jaune pour succéder à Peter Hasler, qui a atteint la limite d’âge pour la fonction, fixée à 70 ans.

C’est étrange…
Reste que les propos émis par Peter Hasler étonnent. «Toucher à une augmentation du prix du timbre ne peut être que le dernier recours, quand toutes les autres solutions auront été passées en revue», insiste Mathieu Fleury, secrétaire général de la Fédération romande des consommateurs (FRC). «La Poste doit se renouveler, et je pense qu’elle n’est pas au bout de ce qu’elle peut faire avant d’augmenter ses tarifs. La Poste distribue non seulement du courrier, mais aussi des paquets et de la publicité. Elle a donc la possibilité de générer plusieurs revenus avec la même activité et le même personnel. Elle doit donc mettre tout sur la même table et pas seulement prendre les chiffres de chaque activité isolément.»

Et Mathieu Fleury de poursuivre: «Vingt centimes, pris comme cela, isolément, cela n’a pas l’air énorme. Mais c’est une question de masse: il faut les multiplier par le nombre d’envois et on voit alors un vrai impact sur l’ensemble des ménages. Et il ne faut pas oublier le contexte: le président de La Poste avance cette idée alors que l’on se trouve dans une période d’inflation nulle, voire négative. Donc c’est inadmissible de venir aujourd’hui avec une telle proposition. D’autant que nous ne sommes pas loin de la votation du 5 juin, sur les services publics: c’est donc assez particulier de la part du président de La Poste de tendre ainsi les verges pour se faire battre en parlant d’une éventuelle hausse des coûts du timbre dont personne ne veut!»

Un avis partagé par le conseiller national socialiste Mathias Reynard (VS): «Le moment choisi pour ce genre d’annonce est étrange… A quelques semaines de la votation du 5 juin, La Poste devrait plutôt convaincre les gens sur la qualité de son service public. Je me pose la question: c’est quoi l’objectif? Ce qui me manque dans le discours de La Poste, c’est sa vision stratégique. Elle ne cesse de détériorer ses prestations, fait pression sur son personnel, tout en réalisant des centaines de millions de bénéfice. De plus, elle sous-traite de plus en plus ses prestations, ce qui est purement scandaleux. J’ai de la peine avec cette direction. Je ne suis pas contre une augmentation après tant d’années, pour autant qu’il n’y ait pas régression sur régression. J’ai un peu l’impression que La Poste se gère comme une multinationale, en cherchant à maximiser ses bénéfices, en coupant les prestations partout, en et mettant la pression sur son personnel. Ce n’est pas la vision que j’ai d’une entreprise qui est en majorité en mains des citoyens de ce pays!» I

Kessava Packiry et Rachel Richterich, Le Courrier

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