RETRAITES L’Union syndicale suisse part en campagne avec l’initiative AVSplus qui augmente de 10% les prestations de l’AVS.
«Beaucoup de gens ont une image fausse des finances de l’AVS», affirme Daniel Lampart, l’économiste en chef de l’Union syndicale suisse (USS).

«Elles présentent un rapport coût-prestation imbattable et leur évolution est fiable. Ce n’est qu’avec la prochaine arrivée à la retraite de la génération des baby-boomers qu’il faudra procéder à une légère augmentation des cotisations.» Pas de quoi inquiéter l’assemblée des délégués de l’USS. Elle a adopté hier une résolution sur le renforcement de l’AVS qui sonne comme le coup d’envoi de la campagne pour l’initiative syndicale AVSplus soumise au peuple le 25 septembre.

C’est aussi en septembre que le Conseil national doit débattre de la réforme globale de la prévoyance vieillesse soumise par Alain Berset. Les deux projets n’ont pas la même logique. Le projet Berset est un paquet qui porte à la fois sur le 1er et le 2e pilier. Il veut stabiliser le niveau des rentes en portant l’âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans, en réduisant le taux de conversion des avoirs du 2e pilier de 6,8% à 6% et en relevant le taux de TVA. Par contre, l’initiative AVSplus n’intervient que sur le premier pilier. Elle préconise une augmentation de 10% des rentes AVS, ce qui correspond à environ 200 francs de plus par mois pour une personne seule et 350 francs pour un couple. Il en coûterait près de 4 milliards de francs.

Prestations en baisse

Quoique l’initiative syndicale se concentre sur l’AVS, les difficultés des caisses de pension apportent de l’eau à son moulin. Elles ont conduit à une réduction régulière des prestations. «Il suffit de comparer le certificat d’assurance remis par la caisse de pension avec celui d’il y a 10 ans», note Doris Bianchi, en charge du dossier à l’USS. «Alors même que le taux de conversion légal est de 6,8%, le taux moyen effectif est de 5,4% car il en englobe aussi la partie sur-obligatoire qui n’est pas soumise à un taux minimum.» Rappelons que le taux de conversion définit le montant de la rente. Pour un capital de 500 000 francs, un taux de conversion de 6,8% assure une rente annuelle de 34 000 francs.

Pour l’USS, on ne peut pas compenser éternellement les lacunes de financement en relevant les cotisations ou en procédant à des rachats volontaires. «En 2014», souligne Doris Bianchi, «les cotisations employés-employeurs aux caisses de pension s’élevaient à 19,7% en moyenne, soit 1,5% de plus qu’il y a dix ans. En comparaison, les cotisations paritaires à l’AVS se montent à 8,4% depuis plus de 40 ans.» Aux yeux de l’USS, il est assurément plus rentable, pour les petits et moyens revenus, de renforcer l’AVS que d’essayer à tout prix de renflouer le 2e pilier.

L’AVS privée de 10 milliards

Les syndicats développent par ailleurs un nouvel argument de campagne: «Au cours de ces dernières années, les programmes d’austérité de la Confédération et les mesures de soutien à l’économie ont coûté 10 milliards de francs à l’AVS», affirme Daniel Lampart. «Ils doivent lui être restitués.» A titre d’exemple, il mentionne la seconde réforme de l’imposition des entreprises. Elle aurait provoqué un manque à gagner de 400 millions pour l’AVS car il est plus intéressant pour les propriétaires d’entreprises de se verser des dividendes plutôt qu’un revenu soumis à l’AVS.

Ces arguments portent peu auprès de partis bourgeois. Ne doutant pas du rejet de l’initiative AVSplus, ils sont satisfaits qu’un scrutin rapide leur permette de se concentrer sur le projet Berset. En commission, la nouvelle majorité de droite du Conseil national est en train de durcir le ton par rapport au Conseil des États qui avait voté une augmentation de 70 francs des rentes AVS à titre de compromis. La gauche et les syndicats brandissent déjà la menace d’un référendum.

Le Courrier, 28 mai 2016