Manifestation devant la poste de la Servette, à Genève. Photo Eric Roset
Le syndicat de la Poste dénonce la stratégie de démantèlement des offices postaux. Il s’inquiète des licenciements et des changements d’affectation du personnel.
Une cinquantaine de personnes ont manifesté devant la poste de la Servette, jeudi matin à Genève, à l’appel de Syndicom. Ils dénonçaient la restructuration de la Poste annoncée en octobre dernier. La fermeture de 500 à 600 bureaux postaux sur tout le pays est prévue d’ici à 2020, touchant 1200 emplois. La mesure permettrait d’économiser 280 millions de francs. A Genève, 39 offices sur 54 pourraient disparaître, selon les estimations du syndicat, ce qui menacerait plus de 200 employés.
«La Poste a menti à son personnel!» s’insurge Eric Schwapp, responsable du domaine postal chez Syndicom. Le géant jaune avait annoncé son intention de fermer progressivement ses offices de poste sans effectuer de licenciements. L’idée consiste à remplacer les offices par des agences postales (espace dévoué aux tâches postales dans un commerce existant) ou d’autres solutions comme le service à domicile ou les automates My Post 24.
La Poste aurait depuis annoncé des suppressions d’emplois, «sans en préciser le nombre, en laissant planer le doute et l’insécurité, ce qui est irresponsable de la part d’un employeur qui se dit socialement irréprochable», souligne M. Schwapp.
Des conditions péjorées
Les employés des agences postales ne sont pas soumis à la convention collective de travail (CCT), dénonce encore le secrétaire syndical. L’opacité du géant jaune est également évoquée. «On parle d’un manque de rentabilité de ces bureaux postaux, mais il est impossible d’avoir un regard sur les comptes.»
Jacqueline Bühlmann, porte-parole de l’institution visée, affirme qu’«éviter les licenciements est toujours un objectif déclaré de la Poste. Quand on n’a vraiment pas d’autre solution, un plan social est établi, en collaboration avec les syndicats.» Elle prévient que la liste des offices concernés par une fermeture ne peut pas être dévoilée, car «le dialogue avec les cantons, permettant de répondre aux besoins spécifiques de chaque situation, n’est pas terminé». Un bilan sera fait au printemps. Mme Bühlmann confirme que les employés des agences postales ne sont pas soumis à la CCT, puisqu’employés de la structure qui héberge l’agence. «Ces commerces sont tous des partenaires durables et sûrs. Leurs heures d’ouverture sont adaptées aux besoins de nos clients.» Mme Bühlmann rappelle que la Poste souhaite augmenter le nombre de ses points d’accès (toutes solutions confondues), pour passer de 3700 aujourd’hui à 4000 en 2020.
Manque de soutien de l’Etat
«La population ne veut pas d’un désert postal!» clame M. Schwapp, tout comme la banderole étalée sur le mur derrière lui. Il rappelle qu’à Genève, pas moins de 32 offices ont déjà fermé depuis l’an 2000.
Le secrétaire syndical interroge le rôle de l’Etat dans cette affaire. Bien que contactés par le syndicat, pour l’heure ni le Conseil d’Etat, ni le Conseil administratif, ni encore les gouvernements communaux ne lui ont affiché ouvertement leur soutien, à l’exception de Vernier et de Meinier. Emmanuelle Lo Verso, chargée de communication au Département de la sécurité et de l’économie (DSE) du canton, a pour sa part expliqué que les discussions avec la Poste étaient en cours.
«Si rien ne bouge, on frappera plus fort!» annonce le secrétaire syndical, rappelant la «pause de protestation» de six heures menée au centre postal de Montbrillant en 2003. Cette action avait permis de conserver une centaine d’emplois, assure-t-il. Pour l’heure, une pétition circule.
Les prises de parole soulignent tour à tour la difficulté pour des personnes âgées ou handicapées de s’adapter à la disparition de leur office postal, aux limites d’une simple agence postale qui n’offre pas la totalité des prestations existant dans les offices, la disparition d’un pan de vie sociale. «Fermer une poste, c’est tuer la vie de quartier. En fermer plusieurs, c’est une ville que l’on anéantit», assène Patrick Fleury, du Cartel intersyndical, venu soutenir ses collègues.
Les orateurs rappellent encore la dissolution de la structure étatique des Postes-Téléphones-Télégraphes (PTT) à la fin des années 1990, aboutissant à la création de deux sociétés distinctes «Il ne reste plus qu’à lancer une initiative demandant à nationaliser les télécom et la Poste!» lance un intervenant. Une habitante d’Anières prend également la parole pour témoigner de la résistance de la population de sa commune contre la fermeture de l’office postal, le dernier rescapé de sa région. I
Vendredi 24 février 2017, Stéphanie De Roguin, Le Courrier
Carte des postes menacées en Suisse, Syndicom
Des centaines d’offices en sursis en Suisse romande
La publication par Syndicom d’une carte interactive évaluant le nombre de postes en sursis a fait l’effet d’une bombe. Dans toute la Suisse romande, on retient son souffle, voire on fourbit ses armes en attendant d’en savoir davantage.
Ainsi, dans le canton de Vaud, sur 135 offices, Syndicom estime que 100 bureaux sont potentiellement menacés, 7 offices fermeront prochainement et 28 sont assurés de sauver leur peau. Comme le relevait 24 heures dans son édition d’hier, le Conseil d’Etat vaudois a pris position sur l’évolution du réseau postal le 31 janvier en précisant qu’il «ne cautionnera aucune fermeture ou transformation d’office sans que la commune concernée ne l’ait préalablement acceptée».
«La Poste n’a écouté personne»
Car il revient aux communes, et à elles seules, le cas échéant, de recourir. Ces derniers mois Ollon, Froideville, Puidoux, Mies-Tannay se sont opposés à la fermeture de leurs offices postaux. «En 2015, le syndic de Lausanne, Daniel Brélaz, était intervenu en faveur du bureau de la Grangette, il y avait eu pétition, manifestation… La Poste n’a écouté personne», rappelle cependant Andrea Eggli, présidente d’Acidus, Association citoyenne pour la défense des usagers du service public. «Il y a dix ans nous avions certes gagné sur Chauderon mais d’autres bureaux ont été fermés.»
Un constat partagé par Olivier Cottagnoud, président du Syndicat autonome des postiers. «Les managers de la Poste se fichent des pétitions et des manifs. L’époque du sauvetage de la poste de St-Jean, à Genève, par la mobilisation citoyenne est révolue!»
A la faveur d’une assemblée générale samedi dernier, il a entendu moult témoignages de collègues licenciés pour dans douze, quatorze, quinze ou dix-sept mois. «Ils ont dix jours pour choisir entre plusieurs options d’un même plan social. Parfois ils n’ont même pas l’occasion de terminer de travailler dans leur bureau et sont déplacés. La Poste nie qu’il s’agit d’un licenciement collectif, avec toutes les obligations légales que cela engendre, alors qu’elle a annoncé que 1200 collaborateurs seront touchés d’ici à 2020. Nous pensons le contraire et accompagnerons chaque personne licenciée qui le souhaite aux Prud’hommes au motif de licenciement abusif.»
Manque de transparence du géant jaune
En Valais, 60 offices seraient menacés. «Si on estime qu’il en faut un par tranche de 20 000 habitants, il restera 15 offices, 13 si l’on s’en tient au nombre de districts et 8 en prenant en compte les arrondissements», égrène Elisabeth di Blasi, députée Alliance de gauche et secrétaire régionale de Syndicom à Sion. «Nous ne savons pas ce qu’il en est car le Conseil d’Etat valaisan, s’il a refusé de valider la liste proposée par la Poste au motif qu’il ne veut pas être le ‘fossoyeur’ des offices, ne nous l’a pas fournie pour autant.»
Quoi qu’il en soit, le parlement valaisan a voté la semaine passée une résolution visant à soutenir l’initiative cantonale tessinoise exigeant que les communes puissent faire recours jusqu’au Tribunal administratif fédéral contre les fermetures des bureaux de poste.
A Neuchâtel, 7 bureaux fermeront, 24 sont en danger et 8 hors de cause selon Jean-François Donzé, secrétaire régional chez Syndicom. Et ce malgré la mobilisation des Comités citoyens pour la défense des offices postaux de La Coudre, de l’Ecluse, de Vauseyon et de Serrières qui ont récolté plus de 14 000 signatures l’an passé. «La Poste annoncera cette semaine qu’elle supprime les cases postales de cinq offices. Elle rend ceux-ci moins attractifs, puis dit qu’elle doit les fermer parce qu’ils ne sont pas rentables, mais ne fournit jamais les chiffres.»
Et le service public?
Dans le Jura, il craint également une saignée. Selon le syndicat, outre l’office des Genevez, appelé à fermer ses portes, 26 bureaux sont menacés et seulement quatre d’entre eux assurés de se maintenir. En revanche, le «bureau de Crémines devra être maintenu. La commune a saisi la PostCom (commission fédérale de la Poste, ndlr) qui lui a donné raison.»
«Un service public ne peut pas se comporter comme n’importe quelle entreprise privée», met en garde Andrea Eggli. «On a créé la Poste avec nos impôts, elle ne peut pas aujourd’hui faire fi des besoins des citoyens. Surtout qu’elle est largement bénéficiaire.» CHRISTIANE PASTEUR
Dans son communiqué du 1er février 2017, signé par M. Leuba, le Conseil d’État Vaudois se prononce ainsi sur l’évolution du réseau postal dans le canton de Vaud :
Répondant à la Poste concernant l’évolution du réseau postal dans le canton de Vaud d’ici 2020, le Conseil d’Etat confirme son fort attachement à un service public de qualité sur l’entier de son territoire, pour l’ensemble de sa population. Il précise qu’il ne cautionnera aucune transformation ou fermeture d’office postal sans que la commune concernée ne l’ait préalablement acceptée. Le Conseil d’Etat charge le chef du Département de l’économie et du sport du suivi de ce dossier.
Belle déclaration sans effets
M. Leuba sur OneFM dit que le Conseil d’État ne cautionnera pas les fermetures en terre vaudoise qui ne seront pas acceptées par les communes. Alors il fera quoi pour les maintenir ouvertes ? son manque de cautionnement fera que la Poste décidera unilatéralement de les fermer, comme elle le fait déjà !
Il semble oublier que son parti a voté contre la motion Voruz au Parlement fédéral qui demandait que les communes soient consultées !
Acidus
Belle déclaration sans effets…
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