Cette fois sera-t-elle la bonne? Après l’initiative pour une caisse unique en 2007, publique en 2014, voici venir celle sur les caisses cantonales. Ses deux parrains, les conseillers d’Etat Pierre-Yves Maillard (PS/VD) et Mauro Poggia (MCG/GE), ont mis toutes les chances de leur côté.
Pas question d’imposer le système aux cantons réticents ni de supprimer les assureurs maladie. Ceux-ci garderaient leurs affiliés, la fixation des primes et la gestion des réserves revenant à une caisse de compensation publique.
On n’en est pas encore à une indexation sur les salaires ni à un plafonnement des primes. Pourtant l’idée mériterait d’être développée. La participation aux coûts des assurés a augmenté de 111 %, contre 23 % de progression des salaires depuis l’introduction de la loi sur l’assurance-maladie (LAMal) en 1996, selon les chiffres du ministre de la Santé, Alain Berset. Dans une étude de 2016, l’Union syndicale suisse dénonçait cette charge toujours plus lourde. «Alors qu’en l’an 2000 une famille de quatre personnes à bas revenus affectait encore 6 % environ de son revenu au paiement de ses primes (avec réduction), cette part est maintenant de 11 %, soit presque le double.» Dans certaines familles, c’est jusqu’à 20 % du revenu qui est ainsi dépensé, soit davantage que ce qui avait été promis par le Conseil fédéral aux débuts de la LAMal: «Aucun ménage ne devrait allouer plus de 8% de son revenu aux primes maladie.»
Si l’idée d’une plus grande transparence dans la gestion des réserves doit être saluée, de même qu’un système supprimant la chasse aux bons risques, des primes identiques pour tous sont-elles réellement la solution contre la précarisation des petits et moyens budgets? On ne peut que regretter d’avoir vu, l’année dernière, la motion de Liliane Maury Pasquier (PS/GE) demandant un plafonnement à 10 % du budget des ménages avoir été balayée par une large majorité du Conseil des Etats.
Sur ce point, notons une lueur d’espoir: la seconde proposition du duo Pierre-Yves Maillard et Mauro Poggia, qui s’attaque frontalement au lobby des assureurs maladie à Berne. Elle interdirait aux parlementaires fédéraux d’occuper des fonctions dirigeantes au sein de ces groupes ou de bénéficier d’avantages financiers. Nul doute que les assureurs (et leurs obligés) s’évertueront à torpiller le texte ou a lui trouver d’ingénieuses parades. Il n’empêche, l’appétit du milieu est tel que le temps est venu de lui limer les dents. Ces deux initiatives romandes ne soigneront pas tous les maux de la LAMal. Mais elles ont cet avantage d’offrir, enfin, une perspective de guérison. I
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Les Romands préparent deux initiatives
Alors qu’en septembre 2014 près de 62% des Suisses avaient refusé les caisses publiques, le peuple pourrait à nouveau se prononcer sur une initiative visant à réformer le système de l’assurance-maladie obligatoire. Cette fois-ci, il s’agit même de deux textes, issus d’un comité romand piloté par deux conseillers d’Etat: le Vaudois Pierre-Yves Maillard (PS) et le Genevois …
Le Courrier, 14 mars 2017, Laura Drompt
La caisse publique fait son grand retour
Assurance maladie• Le Parti du Travail lance une initiative cantonale à Genève pour mettre en place dans le canton une caisse d’assurance maladie et accident publique à but social, avec comme objectif de faire baisser les primes et de rendre plus transparent le système de santé. Au niveau fédéral, les conseillers d’Etat genevois Mauro Poggia (MCG) et vaudois Pierre-Yves Maillard (PS) ont annoncé le dépôt prochain à la chancellerie fédérale de deux initiatives populaires concernant l’assurance-maladie.
«Depuis l’introduction de la LAMal, les primes augmentant chaque année. Aujourd’hui, à Genève la prime moyenne cantonale pour un adulte est de 553 francs. Pour une famille, ces dépenses peuvent représenter 20% de leur budget. De tels montants sont exorbitants, totalement intolérables pour les classes populaires», a expliqué cette semaine Alexandre Eniline, président du PdT à l’occasion du lancement de campagne de récolte de signatures pour instaurer «une caisse d’assurance-maladie et accident publique à but social». Le parti a désormais jusqu’au 12 juillet pour récolter 10’000 signatures. «Nous avons obtenu 18’000 signatures valables pour notre initiative pour une assurance-dentaire. C’est largement possible», estime l’ancien député, René Ecuyer.
L’idée est loin d’être neuve. Dans le canton, l’Alliance de Gauche avait lancé un tel programme en 2002, mais l’initiative avait été invalidée par le Tribunal fédéral, qui considérait que le principe de l’unité de la matière n’état pas respecté. Pour se prémunir de ce désagrément, le parti a simplifié son texte, qui stipule désormais que le canton est doté d’une caisse d’assurance-maladie et accident au sens du droit fédéral et qu’elle est constituée sous forme d’établissement public autonome, qui offre des prestations d’assurance maladie de base. «Nous avons blindé cette initiative cantonale auprès de l’administration fédérale», assure Alexandre Eniline, qui rappelle que cette caisse ne ferait pas disparaître les caisses privées dans le canton.
«Lors de notre récolte de signatures pour notre précédente initiative dentaire, beaucoup de gens nous ont demandé pourquoi on ne faisait rien pour l’assurance-maladie. Voilà du concret », lance René Ecuyer. Rappelons qu’en 2014, les Genevois s’étaient prononcés en 57% en faveur de l’initiative fédérale pour instaurer une caisse publique d’assurance-maladie.
Baisse des primes et gain de transparence
Avec ce texte, le parti espère réduire le montant des primes en réduisant les frais et coûts habituellement imputés aux caisses privées et apporter plus de transparence à un marché complètement opaque, notamment dans la gestion des réserves. Pour preuve,ces dernières années, les assurés de plusieurs cantons avaient payé 2 milliards de primes en trop, dont 463 millions à Genève, versés à des cantons aux primes sous-évaluées. «Aujourd’hui, leur remboursement aux Genevois n’a toujours pas été effectué», soupire Alexandre Eniline.
«Les compagnies se font concurrence, ce qui en soi est déjà une cause de gaspillage dû aux coûts exorbitants de la publicité, les «consommateurs» sont harcelés par des informations contradictoires et le solde actif d’un exercice comparable est absorbé par l’actionnariat», soutient encore Alexandre Eniline. «Certes, notre initiative en tant que telle n’a pas une portée révolutionnaire , ni ne constitue un remède miracle, mais elle constitue un progrès bienvenu et appréciable et pourrait servir de premier pas vers une réforme digne de ce nom du système de santé de notre pays», conclut le président du PdT.
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«Un pas dans la bonne direction»
«Cela va dans la bonne direction, mais ces deux initiatives seront plus compliquées à mettre en place que la nôtre.» Le PdT a tenu à réagir à l’annonce faite en début de semaine par les conseillers d’Etat genevois Mauro Poggia (MCG) et vaudois Pierre-Yves Maillard (PS) du dépôt prochain à la chancellerie fédérale de deux initiatives populaires concernant l’assurance-maladie. La première vise à permettre aux cantons qui le souhaitent de créer une «caisse de compensation», qui prélèverait les primes et participerait aux négociations sur les coûts de la santé. Tous les assurés ayant la même franchise payeraient la même prime et les caisses privées continueraient à exister.
La deuxième initiative veut interdire aux élus parlementaires fédéraux de toucher une quelconque rémunération en provenance d’une caisse maladie. «On ne comprend pas très bien à quoi rime de garde une myriade de caisses privées, si les primes sont prélevées par une seule caisse de compensation», note Alexandre Eniline, qui se félicite de la deuxième initiative qui est «indispensable».
Gauchebdo, 16 mars 2017, par Joel Depommier
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