Les tarifs bas des TPG sont maintenus

Les Genevois disent «non», à plus de 53%, à une augmentation des prix. Les partis se demandent comment financer les transports publics. C’est un «non» cohérent avec les précédents scrutins sur l’initiative pour la baisse des tarifs des Transports publics genevois (TPG).

Dans la même proportion, à près de 53,5%, les Genevois ont refusé une augmentation des prix voulue par le Conseil d’Etat et une majorité de députés (UDC, PLR, PDC, Verts) afin de combler le déficit de la régie publique. Les votants ont confirmé leur volonté de garder les prestations les moins chères de Suisse. Dimanche, une question était sur toutes les lèvres: comment dès lors trouver un financement pour les transports collectifs?

Le député des Verts, Mathias Buschbeck, affiche d’emblée une certaine résignation: «Nous attendons des solutions auprès des référendaires», déclare-t-il. Ces derniers (Ensemble à gauche, PS et MCG) défendent justement un projet de loi déposé devant le Grand Conseil visant à obliger l’Etat à compenser toute baisse des tarifs par une hausse de la subvention et à maintenir, au minimum, une offre équivalente à celle de 2014 (notre édition du 12 mai). Les Verts n’ont, pour l’heure, pas signé ce texte, mais ils devraient le soutenir. «Si des lois suffisaient, ça se saurait. Il faut finir par voter les crédits supplémentaires et le MCG a toujours refusé», prévient Mathias Buschbeck.

Hausse des prix inévitable?

Les partisans d’une augmentation de la subvention étatique pour les TPG devraient pouvoir compter sur le PDC, qui n’envisage pas de nouvelles baisses des prestations, comme c’est le cas depuis deux ans. «Cela mettrait en péril la mise en service du CEVA ou l’application de la loi sur la mobilité, explique Bertrand Buchs, président du PDC. L’Etat doit donner les moyens aux TPG, mais il faudra bien trouver cet argent ailleurs.»

Le PLR, de son côté, combattra tout effort supplémentaire du canton pour les TPG. «Il est trop facile de voter ainsi et de dire que l’Etat n’a qu’à éponger les pertes», critique Alexandre de Senarclens, président du PLR, qui s’inquiète toutefois de la future diminution de l’offre. Quelle solution propose-t-il? Dans l’immédiat, aucune. Il estime qu’il faudra certainement revenir d’ici 4 à 5 ans avec une nouvelle hausse des prix. «C’est inévitable, si on souhaite un développement du réseau.»

Une cotisation patronale?

En face, les référendaires montrent évidemment leur satisfaction. «Les Genevois ont voulu affirmer aux autorités que les TPG ne sont pas un objet de chantage, souligne Thibault Schneeberger, secrétaire de Solidarités. Le Conseil d’Etat doit entendre ce signal et mener une vraie politique en faveur des transports publics.»

Le PS et Ensemble à gauche ne craignent pas une nouvelle diminution de l’offre, car ils pensent disposer aujourd’hui d’une majorité au Grand Conseil pour combler les déficits. Est-ce vraiment le cas? Le MCG semble avoir évolué sur cette question. «Ces dernières années, la volonté du MCG était de pousser les TPG à trouver des économies, soit des mesures d’optimisation sur le réseau et dans l’administration, relève Pascal Spuhler, député du MCG. Mais nous estimons désormais que l’Etat doit compenser les pertes afin de maintenir une qualité de l’offre suffisante.»

La gauche entend surtout proposer une augmentation substantielle du budget des TPG afin de reprendre le développement du réseau, interrompu depuis deux ans. «Dans un premier temps, ce ne sera pas difficile de trouver les 8 millions de francs attendus avec l’augmentation des tarifs, assure Caroline Marti, députée PS. Ce n’est pas grand-chose par rapport au budget de l’Etat qui est de 8 milliards.»

Elle et Thibault Schneeberger défendent par ailleurs plusieurs pistes susceptibles de rapporter des millions supplémentaires. Ils pensent notamment à une cotisation patronale affectée spécialement à la politique de mobilité, une proposition discutée dans le cadre des travaux sur la RIE III cantonale.

Nouvelles coupes dans l’offre

Cette solution est balayée par le Conseil d’Etat. Son président François Longchamp juge le verdict des Genevois «extravagant». Son collègue chargé des transports, Luc Barthassat, précise que les conséquences sur les prestations ne se feront pas attendre. Dès juillet, durant les «heures creuses», la moitié des trams de la ligne 12 ne desserviront plus Carouge. Les coupes devraient atteindre 2% de l’offre d’ici décembre. Le magistrat ne propose pas de nouvelles recettes, mais annonces des «mesures d’efficience» et des pistes pour améliorer la vitesse commerciale des véhicules, comme davantage d’arrêts sur demande. L’Etat demandera également aux communes de participer à la création de lignes.

«Je n’exclus pas qu’il faille revoter sur une hausse des tarifs d’ici deux ans, avec la mise en service du Léman Express, ajoute-t-il, en soulignant que plus de 40 millions de francs devront être trouvés. Il faudra bien que le peuple comprenne.»

Manque de vision

Si le peuple genevois a démontré sa constance, le gouvernement a confirmé qu’il est bien atteint de surdité et, surtout, qu’il manque cruellement de vision politique. Incapable de comprendre le message rendu pour la troisième fois par les votants, le Conseil d’Etat s’apprête à poursuivre la saignée dans l’offre des TPG. La manœuvre est dramatique alors que plus de 1,6 milliard de francs ont été investis pour le réseau ferroviaire de la région, avec le Léman Express. Les prestations des TPG risquent fort de ne pas être à la hauteur de cette infrastructure cruciale. Mais l’exécutif est davantage motivé par la mesquinerie propre aux mauvais perdants, que par la poursuite de l’intérêt public.

Le Courrier, Eric Lecoultre, 21 mai 2017

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