Gratuité des transports publics en débat à Neuchâtel

Le député écologiste Laurent Debrot veut rendre les transports publics gratuits et explique comment financer l’idée. Lors de sa prise de fonction au Grand Conseil il y a deux semaines, il avait fait une proposition fracassante: tenter de rendre gratuits les transports publics dans le canton de Neuchâtel. Hier, dans les colonnes de L’Express/L’Impartial, l’élu a détaillé comment il comptait concrétiser son projet.

A l’heure actuelle, les transports publics neuchâtelois coûtent 125 millions de francs par an. Une somme en grande partie assurée par des financements publics. La Confédération, le canton et les communes les subventionnent en effet à hauteur de 82 millions de francs. Les 43 millions restants sont assurés par la billetterie. Pour rendre les transports publics gratuits, le député souhaite remplacer les rentrées commerciales par une augmentation des recettes fiscales. Concrètement, il souhaite interdire – et non plafonner comme cela a été écrit dans la presse locale – les déductions fiscales pour frais de transports. Difficile cependant de faire une estimation exacte des potentielles rentrées. «Le seul chiffre dont nous disposions, par analogie à l’impôt fédéral direct, est celui d’une rentrée de 20 millions de francs en cas de plafonnement des déductions à 3000 francs», détaille Laurent Debrot. Impossible de savoir combien arriverait dans les caisses en cas de suppression de toute déduction pour frais de déplacements, mais Laurent Debrot estime «qu’on se rapprocherait du chiffre des ventes de billets et d’abonnements».

De nombreux obstacles

Alors que les Neuchâtelois sont très nombreux à devoir travailler hors du canton et que les transports publics sont peu performants dans les régions reculées, l’idée de devoir tous payer risque d’en agacer plus d’un. Mais le député vert a trouvé la parade: «Il y aura la possibilité de faire des aménagements, et donc des déductions, pour les personnes travaillant hors du canton ou celles qui sont obligées de prendre la voiture, comme les travailleurs de nuit.»

Encore à l’état embryonnaire, la proposition devra franchir de nombreux obstacles. Le député hésite encore entre une initiative populaire ou une motion. Avec un Grand Conseil majoritairement à gauche, une motion pourrait atterrir sur le bureau du Conseil d’Etat. Mais ses chances de survie après ces étapes sont très minces. D’une part le gouvernement, par la voix de Laurent Favre, conseiller d’Etat chargé de la mobilité, a déjà fait savoir son hostilité au projet. D’autre part, vu les sommes en jeu, il faudrait une majorité qualifiée au parlement pour valider le projet…

Reste donc l’idée d’une initiative populaire. Pas sûr cependant que la proposition trouve un bon accueil au sein de la population. En 2004, les habitants du Locle, ville à gauche, avaient sèchement refusé la gratuité des transports (74% de non). «Ce n’est pas pareil. Au Locle, il n’y a presque pas de transports publics. La population souhaitait développer les transports plutôt que de les rendre gratuits. Du reste, les Verts y étaient opposés», rétorque Laurent Debrot. Avant de se lancer dans son projet, le député devra déjà convaincre son comité cantonal de le suivre dans cette aventure. I

Le Courrier, Neuchâtel, Mohamed Musadak

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