Les primes d’assurance maladie ont augmenté de 159% en 20 ans… Faut-il continuer à accepter sans broncher l’inéluctable? Une initiative demande la liberté d’organisation des cantons dans ce domaine.
Il n’y a rien d’étonnant que ce soit justement au lendemain de l’annonce des hausses massives des primes que politiciens, médecins, consommateurs, associations, AVIVO et même le fondateur de l’assurance ASSURA – actuellement retraité – ont présenté à la presse un texte d’initiative propre à fédérer un mouvement large, sans «röstigraben» et sans le piège d’un débat gauche droite. Ils demandent «la liberté d’organisation des cantons». Il est temps en effet que, sur le modèle des caisses de compensation du chômage ou de l’AVS, un acteur cantonal ou régional d’intérêt public puisse contrôler les assureurs et les primes vu sa connaissance des coûts réels. C’est simple et facile à mettre en place car la structure est légère. Il s’agit de redonner une responsabilité politique aux cantons et non aux assureurs. Face à l’explosion chaotique des coûts et des primes, un contrôle sérieux de qualité se révèle indispensable et on sait qu’il est devenu actuellement impossible au niveau fédéral, vu le refus populaire d’une caisse publique en 2014.Comment ça marche?
La caisse cantonale proposera une prime identique à tous les assurés selon le modèle d’assurance (famille, HMO par exemple) ou la franchise choisie. On sortira enfin des disparités de primes incompréhensibles puisque les prestations sont exactement identiques. En 2016, l’assuré avait le choix entre 847 contrats différents pour son assurance maladie pour exactement les mêmes remboursements de ses factures. 40 assureurs proposaient des primes allant de 370 francs à 701 francs par mois pour une franchise de 300 francs. Quant aux assureurs, ils n’encaisseront plus les primes – ce que fera la caisse de compensation – mais continueront à effectuer le même travail qu’actuellement: paiements des factures et leur contrôle etc.
Corriger l’absurde système des réserves
Actuellement, toute caisse maladie qui a attiré de nouveaux adhérents augmente ses primes l’année suivante afin de reconstituer ses réserves. En effet, la loi impose qu’elles couvrent environ 20% des dépenses annuelles de la caisse. Or, lorsque l’assuré change de caisse, les réserves qu’il a contribué à payer avec ses primes ne le suivent pas auprès du nouvel assureur. C’est un cercle vicieux.
Avec le système cantonal proposé, toutes les réserves seront mutualisées dans une seule caisse – la caisse de compensation- qui encaissera les primes. Il est donc évident que les sommes accumulées dans les réserves vont diminuer vu le changement de caisse devenu moins impérieux, puisqu’il y aura une même prime pour tous quel que soit l’assureur. Il y aura donc une plus grande stabilité des primes, qui correspondront enfin à la réalité des coûts.
Place à la prévention
Actuellement, les changements de caisses par les assurés n’encouragent pas la prévention, qui pourrait bénéficier aux assurés d’une caisse concurrente. Avec l’ensemble des assurés d’une région ou d’un canton dans la même caisse de compensation, l’intérêt de la promotion de la santé devient évident. C’est l’un des sérieux avantages du nouveau système proposé.
Ajoutons encore qu’un des défauts majeurs de l’actuel système réside dans la chasse aux bons risques, comme les jeunes, censés être en bonne santé donc coûter moins cher. C’est une dure concurrence face aux assurances qui accueillent des malades chroniques ou des assurés plus âgés. Avec une caisse de compensation, tous les assurés sont dans un seul groupe de risque et il n’y a plus besoin de compenser coûteusement les risques. On passe ainsi d’un système de compensation des risques à une compensation des coûts.
Tous ces avantages ont convaincu des médecins, des conseillers d’Etat ou députés aussi bien PLR, PDC, Verts lib et MCG que PS ou Verts, ainsi que la FRC, Bon à Savoir et K Tip, l’AVIVO et le MPF et même Jean-Paul Diserens, fondateur d’ASSURA qui n’hésite pas à dire qu’il s’agit d’un changement fondamental, prélude au contrôle des frais des soins. «Le meilleur compromis offert aux assureurs.»
Plus d’informations sur www.primesplusjustes.ch
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Pour un Parlement indépendant des caisses maladie
On ne peut être à la fois surveillé et surveillant, régulateur et régulé! Le nouveau conseiller fédéral élu est surnommé Krankencassis vu ses liens avec les assureurs, comme plus de 15% des élus aux Chambres fédérales. Considérant qu’il paraît normal d’interdire aux employés de la Poste ou des CFF de siéger à Berne, une deuxième initiative a été lancée contre le lobby des assurances. Elle propose une incompatibilité claire entre l’exercice qui conduit à mettre en œuvre l’assurance obligatoire de soins et un mandat de parlementaire fédéral.
Plus d’informations sur www.stop-lobby-assureurs.ch
Gauchebdo, 5 octobre 2017, Christiane Jaquet
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