Pas de répit pour les seniors

Comme chaque année depuis 2015, la conférence nationale sur les travailleurs âgés a réuni des représentants de l’État – sous la houlette du conseiller fédéral (PLR) Johann Schneider-Amman –, du patronat et des syndicats

pour discuter de la situation des salariés âgés de plus de 55 ans. Et comme chaque année, patrons et Conseil fédéral ont refusé toute mesure visant à protéger les seniors.

DU CHÔMAGE AU SOCIAL. La conférence s’est tenue alors que la situation des aînés sur le marché du travail est au cœur du débat politique.
D’une part, une part grandissante de la population prend conscience que le marché du travail se durcit pour les salariés âgés. Selon les chiffres du Seco, le nombre de sans-emploi de 50 ans et plus est passé de 45 000 à 59 000 personnes en Suisse, de 2012 à 2017. Les seniors passent beaucoup plus de temps sans emploi que les autres chômeurs – 273 jours en moyenne. Selon la CSIAS, un tiers des personnes de plus de 55 ans arrivant en fin de droit ne retrouveront pas de nouvel emploi – un phénomène qui s’est accentué au cours des deux dernières années. Les seniors se retrouvent aussi plus souvent que la moyenne en situation de sous-emploi. Les conséquences de ce durcissement sont souvent dramatiques: de 2010 à 2016, le nombre de bénéficiaires de l’aide sociale de plus de 55 ans a augmenté de 50,5% (1) !

OFFENSIVE DE LA DROITE. Alors que le marché du travail exclut un nombre grandissant de travailleurs âgés, les milieux patronaux veulent repousser l’âge de la retraite. Ils se heurtent à une forte résistance, comme en témoigne le récent refus, en votation populaire, de l’élévation de l’âge de la retraite des femmes (PV 2020). Une partie de ce NON s’explique par la conscience qu’a un nombre important de salariés que repousser l’âge de la retraite représente un risque accru de finir sa vie active au chômage, à l’assurance invalidité ou à l’aide sociale.

EN FINIR AVEC LES FINS DE DROIT. C’est dans ce contexte que la Conférence suisse des institutions d’action sociale (CSIAS) a proposé, au mois de février, une mesure novatrice pour améliorer la situation des chômeurs âgés. Selon la CSIAS, les salariés ayant perdu leur emploi après 55 ans – et ayant travaillé au moins vingt ans – ne devraient plus se voir exclus de l’assurance chômage (les «fins de droits»). Même après l’épuisement des indemnités journalières prévues par la Loi sur l’assurance chômage, les seniors resteraient inscrits dans les ORP à des fins de placement. En parallèle, au lieu de basculer vers l’aide sociale, ils continueraient à recevoir des prestations de l’assurance chômage, basées sur le barème des Prestations complémentaires – plus élevées de 60% à 95% que celles de l’aide sociale.

«MESURES À ÉTUDIER». Comme le souligne la NZZ, il est cependant peu probable que le Conseil fédéral et les associations patronales acceptent de vraies mesures de protection des travailleurs âgés (2). Les milieux patronaux s’opposent à toute prolongation des indemnités de l’assurance chômage et refusent d’améliorer la protection contre les licenciements. Ils préfèrent évoquer des temps de travail revus à la baisse pour les travailleurs âgés 3 – ou, à l’image de Gian-Luca Lardi, le président de la Société suisse des entrepreneurs, carrément des baisses de salaires (4). La conférence du 26 avril n’a donc débouché sur aucune mesure concrète. Elle s’est bornée à noter que «la Confédération, les Cantons et les partenaires sociaux examineront diverses propositions permettant d’éviter aux chômeurs âgés arrivant en fin de droits de connaître des difficultés financières et sociales». De son côté, l’USS revendique une série de mesures:

◼ une protection accrue des travailleurs de plus de 50 ans contre les licenciements;
◼ de meilleures possibilités de retrouver un emploi pour les chômeurs âgés;
◼ le droit à un bilan de compétences ou à une orientation professionnelle pour les travailleurs (et les personnes au chômage), et à davantage de
soutien pour leur formation initiale;
◼ un accès facilité au certificat fédéral de capacité (CFC);
◼ une meilleure couverture sociale pour les salariés âgés – avec la possibilité pour les chômeurs de plus de 58 ans de rester assurés dans leur caisse de pensions et conserver leur droit à une rente;
◼ une interdiction de discriminer les travailleurs âgés. ◼

(1) Conférence de presse de la CSIAS,
22 février 2018.
(2) NZZ, 27 avril 2018.
(3) Le Temps, 5 avril 2018.
(4) NZZ am Sonntag, 4 décembre 2016.

SERVICES PUBLICS, 4 mai 2018

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