Le conseil d’administration de La Poste sous pression

Après la démission de la directrice et du vice-président du conseil d’administration du géant jaune, de plus en plus de voix dénoncent une gestion interne désastreuse. La Poste doit faire face à de nombreuses critiques après les révélations de l’affaire CarPostal.

La pression augmente sur le conseil d’administration de La Poste. Son vice-président Adriano Vassalli a annoncé samedi sa démission. D’aucuns, à gauche comme à droite, demandent que d’autres membres tirent les conséquences de l’affaire CarPostal.

Scandale CarPostal

La direction ne doit pas être la seule à faire les frais des 90,9 millions de francs de subventions indues perçues entre 2007 et 2015, souligne dans une interview à la SonntagsZeitung le Zougois Thomas Aeschi, chef du groupe UDC au Parlement.

Certains membres du conseil d’administration de La Poste ont également failli à leur devoir.

Le vice-président du CA Adriano Vassalli, responsable du comité d’audit, des risques et de la conformité, a annoncé par voie de communiqué samedi sa démission pour le 26 juin prochain, date de l’assemblée générale de La Poste. Une décision qu’il dit mûrement réfléchie et prise dans l’intérêt de l’entreprise.

La Poste prend acte de cette démission, a indiqué à Keystone-ATS son porte-parole François Furer. Le conseil d’administration discutera ces prochaines semaines de la suite des opérations. Cela facilitera un nouveau départ de La Poste, a commenté de son côté le Département fédéral des transports (DETEC).

Rapport accablant

M. Vassalli a aussi démissionné parce qu’il était sous pression. Pour expliquer sa décision, il dit avoir essuyé différents reproches ces derniers temps. Et d’assurer qu’il n’a pourtant commis aucune violation de ses devoirs, ni reçu la fameuse note du 21 août 2013.

Dans cette note, l’organe de révision interne de La Poste soulignait la problématique des coûts comptabilisés par CarPostal aux dépens du trafic financé par la manne publique. Ses destinataires étaient entre autres le président du conseil d’administration Peter Hasler et la directrice Susanne Ruoff.

Les reproches à l’encontre de M. Vassalli devraient aussi valoir pour son homologue Susanne Blank, co-responsable de la gestion des risques du géant jaune. La SonntagsZeitung indique, en se fondant sur le rapport d’enquête publié la semaine dernière, que tous deux ont bien eu connaissance de la note de l’organe de révision interne.

C’est aussi l’avis de l’ex-directeur de CarPostal, Daniel Landolf, pour qui le duo était au courant des transferts illégaux de coûts et et de produits du transport régional indemnisé vers d’autres secteurs. Au contraire, Mme Blank a assuré la semaine dernière qu’elle n’avait pas reçu la fameuse note.

Urs Schwaller visé

Le président de La Poste Urs Schwaller est lui aussi toujours plus dans le viseur des politiques. Le conseiller national Philipp Hadorn (PS/SO) lui reproche dans la SonntagsZeitung de n’avoir soumis à l’enquête que les années où il n’était pas encore à ce poste. Selon lui, il faut que les investigations recoupent aussi 2016 et 2017.

Selon le récent rapport d’enquête, M. Schwaller a eu des indices de ces manipulations comptables, écrit l’hebdomadaire. D’après le projet d’un rapport de révision datant de juillet 2016, CarPostal était face à un conflit d’objectifs qui opposait les impératifs de profit de l’entreprise et l’interdiction pour elle de faire des bénéfices dans le trafic régional subventionné.

La Poste répond dimanche que M. Schwaller a déjà communiqué ouvertement lors de la conférence de presse du 11 juin dernier. Il avait alors déclaré avoir vu passer une brève information sur les problèmes de comptabilité peu après son entrée en fonction en 2016, sans toutefois faire le lien avec le scandale dévoilé aujourd’hui. Et de regretter qu’il n’était «pas assez critique à l’époque».

Culture du non-dit

Interrogé par Le Matin Dimanche, l’ex-président du conseil d’administration de La Poste, Claude Béglé, dénonce pour sa part une «culture du non-dit» et une «manière de manipuler l’information» au sein du géant jaune. La Poste a un grave problème de gouvernance, selon le conseiller national (PDC/VD), président entre 2009 et 2010.

«Ce manque de transparence peut entraîner des dérives» difficiles à mettre à jour, car «la structure de l’entreprise fait que ceux qui sont aux commandes gardent une marge de manoeuvre», notamment dans l’allocation des coûts, poursuit M. Béglé. «Ce flou leur donne une vraie liberté d’agir», ajoute-t-il, réaffirmant que lui-même n’était pas au courant des malversations comptables.

Le scandale de CarPostal a été révélé au public en février dernier. Dans le cadre d’une révision, l’Office fédéral des transports a découvert que la filiale de La Poste avait réalisé des bénéfices dans un domaine subventionné. Le Conseil fédéral a décidé il y a dix jours de restreindre la décharge accordée au conseil d’administration de la Poste pour l’exercice 2017. (ats/nxp)

Le Matin, 17.06.2018

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