Trump et sa réforme fiscale favorable au 1% le plus riche? Les grands patrons adorent. Pour Stephen Schwarzmann, CEO du fonds d’investissement Blackstone, les Etats-Unis sont aujourd’hui «the place to be».
Sergio Ermotti, le big boss d’UBS, est d’accord: «La réforme fait des Etats-Unis un pays très attractif pour faire des affaires». Et de préciser: «Cela va avoir un impact profond à long terme et doit être une préoccupation pour la Suisse et le reste du monde.»
M. Ermotti peut dormir tranquille. Le reste du monde suit M. Trump, et de près. En France, le président Macron vient d’adopter une réforme fiscale qui constitue aussi «une incroyable fuite en avant dans le mouvement de dumping fiscal en faveur des plus riches» (1). Il émet ainsi un signal à l’attention de l’ensemble de l’Union européenne. Même revus à la baisse, les taux d’imposition des bénéfices pratiqués par les Etats-Unis (20%) et la France (25%) restent largement supérieurs à la moyenne helvétique – 16,6% (2).
Le Conseil fédéral est pourtant décidé à consolider sa pole position dans la course mondiale au dumping fiscal: «Le Projet fiscal 17 est devenu extrêmement urgent», a lancé le conseiller fédéral (UDC) Ueli Maurer depuis les montagnes davosiennes. Et d’appeler le Parlement à adopter dès octobre son projet de baisse de l’imposition des entreprises.
Comme le souligne le conseiller aux États (PDC) Pirmin Bischof, PF 17 est «presque identique» à la RIE III refusée en février dernier (3). Il s’agit d’un cadeau massif destiné aux actionnaires. Un cadeau qui n’est pas isolé: depuis vingt-cinq ans, les contre-réformes fiscales profitant aux plus favorisés s’enchaînent à un rythme effréné, pendant que les programmes d’économies se succèdent. Et les milieux bourgeois ne comptent pas s’arrêter là: si PF 17 devait passer la rampe, le Conseil fédéral s’attaquerait juste après à l’impôt sur le droit de timbre, tandis que la droite intensifierait sa campagne visant à abolir l’impôt sur la fortune.
Le conseiller fédéral et les milieux patronaux sont nerveux. Ils veulent éviter le lancement d’un référendum, car une large majorité de la population a refusé leur dernier paquet fiscal. Les pressions visant à désarmer l’opposition à PF 17 vont donc crescendo. Elles combinent un matraquage médiatique sur la nécessaire «compétitivité» de la place helvétique avec la négociation de prétendues «compensations sociales». Les appels dans ce sens se font pressants. Et le syndicat travail.suisse a déjà cédé au chant des sirènes.
PF 17 s’inscrit dans le processus de concentration inouïe des richesses décrit par l’ONG Oxfam. Aucune «contrepartie sociale» ne compensera les coupes brutales que son application entraînerait pour une majorité de la population. Il faut donc se préparer à un nouveau référendum. Le SSP et l’USS ont adopté des résolutions dans ce sens.
Reste à tenir le cap et ne pas céder aux appels à la capitulation. ◼
1) Tribune de Thomas Piketty dans Le Monde, 9 décembre 2017.
2) NZZ, 11 janvier 2018.
3) Blick, 29 janvier 2018.
GUY ZURKINDEN - RÉDACTEUR - Services publics, 2.02.2018
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