Appel pour préserver le service public

Les syndicats et la gauche alertent sur les conséquences de la baisse de l’imposition des entreprises. Les investissements dans les écoles, la culture ou encore les prestations sociales pourraient être touchés par la baisse du taux d’imposition des entreprises, selon les signataires de l’appel.

Fiscalité des entreprises

C’est une course contre la montre. Le volet vaudois de la réforme de l’imposition des entreprises (RIE III) entre en vigueur dans moins de quatre mois. En janvier 2019, les entreprises ordinaires seront imposées à 13,79% contre 21% aujourd’hui. Rien ne bouge pour les multinationales à statuts spéciaux, avant que la réforme fédérale ne soit sous toit. En conséquence, communes et Etat devront fonctionner en 2019 avec un trou dans leur porte-monnaie évalué à 442 millions au total (lire ci-dessous).

A la veille de la présentation du budget du canton, alors qu’un référendum sur le volet fédéral de la réforme fiscale est annoncé, des syndicats et une partie de la gauche ont lancé mercredi un appel pour le maintien des prestations publiques. Ils demandent d’attendre l’abolition des statuts spéciaux avant de mettre en œuvre la réforme et que les pertes supplémentaires pour les communes soient entièrement compensées.

Elus de la gauche radicale, représentants des Jeunes Verts, de la Jeunesse socialiste et syndicats (SUD, SSP, Acidus) veulent des garanties pour que les contribuables à bas et moyens revenus ne payent pas les pots cassés de la baisse des impôts des entreprises et que les prestations à la population soient maintenues.

Perte fiscale monumentale

«Les municipalités doivent préparer un budget 2019 qui tienne compte d’une perte fiscale monumentale. La compensation du canton est largement insuffisante et nous avons très peur de devoir diminuer des prestations», relève Karine Clerc, municipale POP à Renens. Les investissements dans les écoles, la culture ou encore les prestations sociales pourraient être touchés par la baisse du taux d’imposition des entreprises, selon les signataires de l’appel. Nyon, qui a fait parler de lui en décidant d’augmenter les impôts des personnes physiques pour compenser les pertes dues à la RIE III, a également reporté des investissements dans les bâtiments scolaires, indiquent-ils.

Communes et État devront fonctionner en 2019 avec un trou évalué à 442 millions

Autre exemple, le cadre de référence pour l’accueil parascolaire: les communes ont décidé d’augmenter le nombre d’enfants par éducateur et de donner davantage de responsabilités à du personnel non formé. «C’est un secteur particulièrement sous pression, parce qu’en fort développement. Et comme les communes ont ­obtenu la compétence de fixer elles-mêmes ces normes, elles ont là une variable d’ajustement», juge Julien ­Eggenberger, du SSP.

«Que les communes pauvres doivent supprimer des prestations pour que les entreprises puissent diminuer leurs impôts, cela pose des questions fondamentales», souligne pour sa part Karine Clerc. Pour Oleg Gafner, des Jeunes Verts vaudois, la culture, «bouc émissaire» des collectivités quand il s’agit de faire des coupes, risque de fortement en pâtir. «Nyon a déjà supprimé le festival Luna Classic», note-t-il.

Au niveau cantonal, le Syndicat des services publics relève que le budget pour mettre en œuvre l’école numérique manque et que le développement du soutien socio-éducatif, promis dans le programme de législature, diminue comme peau de chagrin.
Au Grand Conseil

La bataille se poursuivra au Grand Conseil. Député d’Ensemble à gauche, Hadrien Buclin demande de geler la baisse du taux d’imposition tant qu’il n’y a pas de cadre fédéral. Sa motion devrait être discutée début octobre, dans le cadre d’une série d’interventions sur la fiscalité. «Aujourd’hui, le maintien de la baisse de l’imposition des entreprises, sans suppression des statuts spéciaux, foule aux pieds les promesses faites à la population lors de la votation sur la RIE III en 2016», juge le député.
Effets en chiffres de la RIE III vaudoise

La baisse du taux d’imposition des sociétés ordinaires en 2019 représentera un trou de 442 millions dans le budget de l’Etat et des communes (évaluation du Conseil d’Etat de 2016). Le canton, qui peut compter sur un excédent de revenus, versera 50 millions aux communes en 2019 pour compenser une partie des 130 millions de francs de pertes qu’elles essuieront.

En mettant en œuvre la réforme de l’imposition des entreprises sans attendre l’abolition des statuts spéciaux, le canton de Vaud renonce à 50 millions que devait rapporter le changement de régime pour les sociétés à statut. Il se passe aussi des compensations fédérales, évaluées à 107 millions en 2016. Plus fragiles financièrement, les communes sont davantage touchées que le canton. SDT

Le Courrier, 20.09.2018, Sophie Dupont

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