Les recettes fiscales constituent la première et la plus pérenne des ressources pour financer le développement d’un pays. Or, le taux moyen des prélèvements fiscaux sur les entreprises en Europe est en baisse constante, tandis que le travail est toujours plus imposé. Cette situation répond à la concurrence fiscale dommageable que mènent certains pays comme la Suisse.
L’Union Européenne (UE) et l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) s’inquiètent de cette
compétition coûteuse pour les populations et proposent une solution internationale et concertée. Nos autorités répondent
à cette inquiétude avec le Projet fiscal (PF 17), qui aurait pour conséquence de descendre, pour toutes les entreprises, le taux
d’imposition aux alentours de 14% en moyenne nationale.
Elles n’ont ainsi rien trouvé de mieux qu’étendre le taux d’imposition préférentiel qu’avaient les multinationales à toutes les entreprises du pays! Cette pirouette n’étant pas suffisante, il a fallu que les milieux les plus agressifs rajoutent quelques niches fiscales supplémentaires (patent box, NID, déductions pour recherche et développement), et un garde-fou: «L’addition de ces différents instruments ne devrait pas permettre aux entreprises d’échapper totalement à l’imposition.» Nous voilà rassurés.
Voyons les conséquences de telles mesures.
En Suisse, un abaissement des prélèvements fiscaux d’une telle ampleur modifierait la conception de la fiscalité, dont le niveau de prélèvement sert à financer le développement de l’État. Le PF 17 modifierait ainsi la finalité de l’imposition: le taux d’imposition ne sert plus à couvrir les dépenses de la collectivité, mais devient un instrument de concurrence fiscale dommageable entre les nations. Dérouler ainsi le tapis rouge à «l’évasion fiscale» permet à nos autorités de poursuivre une position isolée face aux demandes de concertation internationale et d’harmonisation sur la fiscalité.
La concurrence fiscale altère la structure de l’imposition. En effet, les pertes fiscales résultant des allègements de l’imposition sur les multinationales seront compensées, en partie, par l’augmentation des prélèvements sur les personnes physiques. La charge fiscale des contribuables qui «menacent de s’envoler» se reporte sur les contribuables qui ne «peuvent pas s’envoler» – c’est à dire les travailleurs et les consommateurs.
À l’étranger, le PF 17 permettrait aux multinationales ayant leur siège en Suisse de continuer à échapper à l’impôt dans les pays où elles produisent. Ceci entraine, pour les pays concernés, un assèchement des recettes publiques, qui ne permettent pas de financer l’ensemble de leurs obligations étatiques – défense nationale, éducation, système de santé, etc.
La concurrence fiscale induit, de manière générale, trois options cumulables: une augmentation d’impôts pour les travailleurs et les consommateurs; un endettement public supplémentaire; une suppression de certains services au détriment des populations.
En conclusion, nous refusons que la fiscalité soit un instrument de la concurrence entre les Etats. Nous ne céderons pas au chantage de l’urgence et de la culpabilisation. C’est l’arrogance, l’irresponsabilité et l’agressivité aveugle du PF 17 qui portent en eux le refus populaire.
La consolidation de l’AVS est possible sans relever l’âge de la retraite. Le rejet de la RIE III a souligné l’impopularité de cette concurrence fiscale.
Nous souhaitons que notre développement soit le fruit de notre créativité et de notre travail honnête, voilà pourquoi nous refusons les propositions de «braconnage» servant à augmenter encore l’enrichissement des multinationales au détriment des populations locales et étrangères.
Seule l’harmonisation fiscale à l’échelle internationale permettra un développement durable.
Services publics, Carte blanche à PIERRE DUFFOUR, ATTAC Fribourg
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