RFFA, côté cantons

La votation sur la réforme fiscale fédérale aura lieu le 19 mai prochain. Le projet favorise le dumping dans les cantons, qui prévoient des baisses massives de l’imposition des bénéfices. La grande empoignade fiscale se rapproche.

Aiguillonnés par le projet fédéral, les cantons ont déjà lancé un nouveau round de sous-enchère fiscale. Ils proposent des adaptations anticipant la réforme fédérale. Si les plans se ressemblent, les ripostes et les coalitions varient selon les cantons.

BÂLE ROULE POUR LA PHARMA. Alors que la population bernoise avait voté contre la baisse des impôts pour les entreprises en automne dernier, celle de Bâle-Ville a accepté une baisse du taux d’imposition des entreprises (de 22% à 13%), le 10 février. Grâce à une déduction des dépenses liées à la propriété intellectuelle (patent box), nombre d’entreprises pourront encore baisser leur facture fiscale. Le gouverne-ment bâlois a vendu son projet à la population en mettant en avant ses «contre-parties sociales»: hausse des allocations familiales, mesures pour les crèches et plafonnement des primes maladie. «Ce que le gouvernement cantonal vend comme un compromis dans le cadre du «projet fiscal 17» au plan fédéral est d’abord une concession aux multinationales, avant tout aux géants de la pharma Roche et Novartis» soulignait la Wochenzeitung1. Porté par la conseillère d’État socialiste Eva Herzog, le projet a été défendu par une «coalition rose-verte», à laquelle s’opposaient syndicats et petits partis de gauche.

RÉFÉRENDUM À FRIBOURG. En Suisse romande, les exécutifs cantonaux s’alignent sur le taux de dumping (13,79%) fixé par le Conseil d’État vaudois. Avec, parfois, de vives résistances.À Fribourg, l’association altermondialiste Attac – rejointe par les syndicats et les Verts – a lancé le référendum (lire notre dernière édition) contre une baisse du taux d’imposition des entreprises à 13,72% – couplée à une baisse de l’impôt sur le capital, à une «patent box» et à la possibilité de déduire les dépenses de recherche et développement. Le SSP participe à la récolte, qui avance bien mais souffre du retard avec lequel le référendum a été lancé. La direction locale du Parti socialiste (PSF) a jeté l’éponge, au grand dam de la coalition fribourgeoise contre les cadeaux fiscaux aux entre-prises. Les jeunes socialistes fribourgeois et la section de Villars-sur-Glâne sou-tiennent le référendum et participent aux récoltes. Si référendum passe, la votation populaire aura lieu le 30 juin.

ENFUMAGE GENEVOIS. Dans le canton de Genève, le projet de réforme fiscale a aus-si été adopté par une majorité du Grand Conseil, avec l’assentiment de la direction du Parti socialiste genevois – dont la plu-part des membres se sont pourtant abstenus lors du vote. Le taux d’imposition des bénéfices a été fixé à 13,99%. Pour faire passer la pilule, le Conseil d’État présente comme une «compensation» un contre-projet à l’initiative populaire demandant une limitation à 10% du mon-tant des primes comme une «compensation». Rien ne lie pourtant formellement les projets et les opposants dénoncent un «enfumage». La votation populaire aura lieu le 19 mai. Les syndicats, les Verts, solidaritéS et les partis à gauche du PS font campagne contre les baisses fiscales.

PAQUET JURASSIEN. Le gouvernement jurassien a transmis son projet de modification de l’imposition des entreprises au Parlement. Il prévoit une baisse du taux d’imposition, à 15%. Le projet prévoit aussi l’introduction d’une «patent box» et de larges déductions pour les dépenses pour recherche et développement. Le taux d’imposition du capital sera divisé par deux. Le projet jurassien propose en contrepartie une cotisation des employeurs pour le financement des crèches, une augmentation des déductions fiscales pour primes d’assurance maladie ainsi que celles pour les frais de garde d’enfant. Le message relatif à la réforme fiscale a été transmis début février au parlement. Les syndicats l’ont dénoncé.

ET SAUCE NEUCHÂTELOISE. Fin novembre, le gouvernement neuchâtelois a présenté le message relatif à sa réforme fiscale. L’impôt sur les bénéfices passerait de 15,6% à 13,4%. Des déductions pour les dépenses issues de la propriété intellectuelle (patent box, 20% du bénéfice total au maximum) et de la recherche et développement (40% au maximum) sont aussi introduites. Le paquet prévoit aussi la possibilité de réduire l’impôt sur le capital pour les sociétés de participation. Il est combiné avec une proposition de baisse des impôts pour les personnes physiques et les propriétaires immobiliers. Le débat au Grand Conseil aura lieu au premier trimestre 2019.

BERSET ET MAURER, ENSEMBLE. Le 19 février, les conseillers fédéraux Ueli Maurer (UDC) et Alain Berset (PS) ont présenté ensemble le projet de réforme fiscale et de financement de l’AVS (RFFA), qui prévoit – entre autres – de verser 1 milliard aux cantons afin de favoriser les baisses d’impôts pour les entreprises. Si ce projet, combattu par le SSP, était refusé le 19 mai, les cantons devraient revoir leurs plans fiscaux.◼
(1)Woz, 24 janvier 2019.

SSP/VPOD, Services publics, Guy Zurkinden, 22 février 2019

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