(Acidus : seule une association sur mille a des impôts à payer, 999 trésoriers d’association remplissent des déclarations d’impôt strictement inutiles. C’est une manière comme une autre d’éviter que l’administration des impôts se penche sur les déclarations des possibles fraudeurs !)
Une association, c’est comme une personne physique, martèlent les responsables du fisc vaudois, Pascal Broulis en tête. Car une association, comme tout contribuable, doit remplir une déclaration d’impôt chaque année.
La grande différence entre une association et une personne physique, comme le martèle aussi Pascal Broulis, c’est que «99,9% des associations» n’ont pas d’impôts à payer. Il a annoncé lundi un relèvement des seuils d’exonération: de 12’500 à 20’000 francs pour l’impôt sur le bénéfice, et de 56’000 à 200’000 francs pour l’impôt sur le capital. La modification légale doit encore être approuvée par le Grand Conseil. En cas de feu vert du parlement, les seuils seraient les mêmes que pour le canton de Fribourg. Le manque à gagner annuel serait inférieur à une centaine de milliers de francs, précise le ministre des Finances.
Déclaration obligatoire
Le monde associatif vaudois se plaint de la manière dont le fisc l’a traité, avec des demandes de déposer des déclarations d’impôt et de remonter de cinq ans pour les comptes annuels. Depuis cette semaine, elles pourront remplir une déclaration en ligne, mais dans une forme extrêmement simple. L’opération prend cinq minutes seulement. Les responsables associatifs pourront aussi bénéficier de formations gratuites pour se conformer à des obligations qu’ils ne soupçonnaient pas.
Et si une association oublie de remplir sa déclaration, ou y renonce en pensant que cela ne lui coûtera rien, elle se trompe: comme pour tout autre contribuable, l’association recevra une sommation pour déposer sa déclaration d’impôt. Si elle n’obtempère pas, elle sera taxée d’office avec amendes, précise l’administration fiscale vaudoise.
Mais comment en est-on arrivé là? A la base, toute association (organisation sans but lucratif) peut se créer librement, sans contrôle étatique. Elle doit juste se conformer au Code civil suisse, qui fixe des règles générales. Ensuite, il y a des associations qui exercent des activités commerciales. Celles-ci doivent s’inscrire obligatoirement au registre du commerce.
Un fichier officiel
Sauf que depuis 2011, toute association, avec ou sans activité commerciale, doit s’annoncer au registre fédéral IDE, qui contient les «numéros d’identification des entreprises».
Depuis, il y a donc un fichier officiel des associations, qui est transmis aux cantons. Ceux-ci connaissent donc toutes les associations sur leur sol et les assujettissent à l’impôt. Ainsi, elles doivent s’acquitter de 4,75% d’impôt sur le bénéfice dès 20’000 francs de bénéfice annuel.
Pascal Broulis assure ne pas vouloir enquiquiner le monde associatif. «Nous voulons qu’il y ait toujours dans ce canton un maximum de bénévoles.» Il relève aussi que l’obligation de remplir une déclaration d’impôt amène l’association à tenir une comptabilité correcte, et à mieux se gérer alors qu’avant cela pouvait se faire «à la bonne franquette».
«Un bon début»
Le député PLR Alexandre Berthoud, président de la commission des finances, se dit satisfait de l’élévation des seuils d’exonération et des mesures de simplification. Avec son collègue de parti Patrick Simonin, il est l’auteur de plusieurs textes déposés au Grand Conseil. «Cela fait plus d’une année que nous avons commencé à travailler sur ce sujet avec les grandes associations, explique Alexandre Berthoud. Le dossier traînait un peu. C’est déjà un bon début.»
COMMENTAIRE
Visage hideux de la bureaucratie
Cela a été dit et répété: «99,9%» des associations n’ont pas d’impôts à payer. Si vous préférez, disons que seule une association sur mille a des impôts à payer, en prenant Pascal Broulis au pied de la lettre. Ou que 999 trésoriers d’association sur mille savent pertinemment que leur astreinte à remplir une déclaration d’impôt est strictement inutile.
C’est un peu comme si vous n’avez pas de chien, mais que vous êtes obligé de déclarer que vous n’avez pas de chien pour éviter de devoir payer l’impôt sur les chiens. Quand la bureaucratie s’emballe jusqu’à l’absurde, elle n’est vraiment pas belle à voir. Certes, le canton de Vaud, comme les autres, ne fait qu’appliquer une règle fédérale. Le grand argentier vaudois n’est pas à blâmer pour avoir inventé cette boursouflure étatiste qui navre l’archipel des petites associations, du bénévolat et des initiatives locales.
Pour un représentant du PLR, le parti qui s’affiche comme l’adversaire de la bureaucratie, l’affaire est tout de même cocasse. Pour le ministre d’un gouvernement qui inscrit la simplification administrative dans son programme de législature, voilà qui est même comique.
Le Courrier, 9 avril 2019 Jérôme Cachin
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