Près de 70 000 signatures ont été déposées contre la suppression de l’impôt sur le droit de timbre. Votation probable en février.
L e 5 octobre, près de 70 000 signatures contre la suppression du droit de timbre ont été déposées à la Chancellerie fédérale. Le référendum avait été lancé par l’Union syndicale suisse (USS), le parti socialiste (PS) et les Vert-e-s.
LE DROIT DE TIMBRE, KÉSAKO? Le droit de timbre est un impôt qui frappe certaines opérations financières, comme l’émission et la négociation de titres. Il consiste en trois types de prélèvement: le droit d’émission sur le capital propre; le droit de négociation, qui frappe l’achat et la vente de titres suisses et étrangers; et le droit de timbre sur les primes d’assurance. Ensemble, ces trois taxes ont rapporté environ 2,2 milliards à la Confédération en 2020. Depuis des années, la place financière, le secteur bancaire et le parti libéral-radical (PLR) réclament l’abolition du droit de timbre, dans son intégralité. En juin, la majorité de droite du Parlement a choisi d’en supprimer le premier volet, le droit d’émission sur le capital propre. Selon le Conseil fédéral, la mesure profitera aux multinationales, aux assureurs et aux sociétés de holding1. Elle coûtera 250 millions de francs par an aux caisses publiques.
Dans un deuxième temps, le Parlement a annoncé qu’il renonçait à éliminer les deux autres tranches du droit de timbre.
L’explication de cette décision est venue du conseiller national et avocat (PLR) Christian Lüscher: «Comme une grande
partie de la modification du droit de timbre a été incluse dans la révision de la loi sur l’impôt anticipé, nous estimons que
nous avons atteint les objectifs que nous voulions atteindre en 2009» (2).
L’IMPÔT ANTICIPÉ DANS LE VISEUR.
Fin septembre, le Conseil national a en effet accepté la réforme de l’impôt anticipé – un impôt de 35% perçu à la source par la Confédération, puis remboursé après la déclaration de ces montants au fisc, sur divers rendements de capitaux (intérêts et dividendes), sur les gains en loterie ainsi que sur certaines prestations d’assurances. Ce projet, proposé par le Conseil fédéral, prévoit de supprimer l’impôt anticipé pesant sur les intérêts obligataires. Il se soldera à court terme par un manque à gagner unique d’un milliard de francs, puis engendrera une diminution des recettes fiscales de 200 millions de francs par année. La contre-réforme prévoit en parallèle de supprimer le droit de timbre
de négociation sur les obligations helvétiques. Elle doit encore être traitée par le Conseil des États.
TOUT POUR LES GROSSES BOÎTES. La bataille contre la suppression du droit de timbre, elle, se joue maintenant. Pour l’USS, cette mesure représente un nouveau privilège fiscal inacceptable, qu’il est indispensable de combattre dans les urnes: «Seules les entreprises très profitables et les hauts revenus y gagnent. L’arnaque de la suppression du droit de timbre coûterait environ 250 millions de francs par an, et de nouveaux privilèges d’une valeur de plus de 2 milliards de francs sont prévus pour les entreprises», souligne la faîtière syndicale. Cette mesure s’inscrit dans une longue série de cadeaux fiscaux aux grandes entreprises et aux plus riches – avec, notamment, la deuxième et la troisième révision de l’imposition des entreprises (RIE II en 2008, RFFA en 2019), qui ont grandement profité aux actionnaires.
RIEN POUR LES SALARIÉ-E-S… Pour Pierre-Yves Maillard, le président de l’USS, «accorder des avantages fiscaux aux riches investisseurs et aux hauts revenus est particulièrement scandaleux dans le contexte actuel. Le pouvoir d’achat des travailleurs et travailleuses à bas et moyens revenus est soumis à une forte pression. La suppression du droit de timbre ne leur apportera rien, mais ils et elles ressentiront douloureusement les conséquences de la diminution des rentrées fiscales, par exemple lors des réductions de primes».
…ET LE SERVICE PUBLIC. Et d’ajouter: «Sans droit de timbre, les pertes fiscales se monteraient à plusieurs centaines de millions de francs. Résultat: les services publics se retrouveront sous la pression de plans d’économies. Pour financer ces cadeaux fiscaux pour les riches, c’est toute la société qui devra faire des sacrifices».
La votation sur la suppression de la première tranche de l’impôt sur le droit de timbre aura vraisemblablement lieu le 13 février 2022. ◼
1 Wochenzeitung, 28 juin 2021.
2 lematin.ch, 30 septembre 2021.
Services publics, 15 octobre 2021
0 commentaire à “Pas de nouveau cadeau fiscal !”