Le Canton a pu vérifier la facture relative aux assurés démunis que lui refile la CSS. Elle est assez juste, mais l’État juge que l’essentiel est ailleurs: l’assurance a changé ses pratiques.
Finalement, l’État de Genève a pu fouiller dans un (petit) pan des affaires de la caisse maladie CSS. Après un long combat, le Tribunal fédéral l’a autorisé à contrôler la liste des actes de défaut de biens que l’assureur lui transmet chaque année afin qu’il en règle le 85% (lire l’encadré).
Jusqu’alors, la CSS s’y était toujours opposée. D’un point de vue financier, le Service d’audit interne (SAI) de l’État n’a pas débusqué grand-chose. Mais selon Patrick Mazzaferri, directeur du Service cantonal de l’assurance maladie, la curiosité du Canton n’a pas été vaine: entre le début de la procédure et son épilogue, la CSS a changé ses pratiques.
Le SAI a visé un tout petit échantillon de 70 actes de défaut de biens relatifs à 2018. Il a constaté une facturation indue d’environ 15 000 fr. Une paille, «mais il s’agissait de signifier que l’État n’est pas là juste pour signer un chèque».
Surtout, le SAI a trouvé des cas où les créances présentées par l’assureur concernaient des frais relatifs aux assurances complémentaires (LCA), que l’État n’a pas à assumer; et d’autres où, quand l’assuré remboursait, l’argent qui aurait dû être rendu au Canton servait d’abord à couvrir les frais engagés par la caisse pour la poursuite. «Ce système a depuis été corrigé par la CSS, salue Patrick Mazzaferri. C’est le plus important.» Genève veut maintenant faire les démarches pour examiner les listes des plus gros assureurs du canton.
Genève paie près de 50 millions
Jusqu’en 2012, quand un assuré était mis en poursuite, son droit aux prestations était suspendu. Une catastrophe: Genève avait ainsi dû mettre sur pied une cellule d’urgence aux HUG pour traiter 15’000 patients incapables de payer leurs primes d’assurance de base. Pour l’éviter, depuis 2012, les caisses gardent les actes de défaut de biens et envoient chaque année une facture au Canton, qui en paie 85% – près de 50 millions. Si l’assuré parvient finalement à régler sa dette aux caisses, ces dernières rétrocèdent 50% de l’argent obtenu à l’État.
Le magistrat veut plus de contrôle
«Quand il s’agit des deniers publics, l’État a raison d’être curieux, juge le conseiller d’État Thierry Apothéloz, chargé du Social. L’audit a permis de faire changer la pratique de la CSS.» L’élu pense qu’elle était réticente à ouvrir ses livres, car «elle n’était sans doute pas à l’aise avec certaines procédures» et que «probablement, les autres assurances ont fait pression pour qu’elle ne lâche pas». Il entend étendre ce type de contrôles «à même de raffermir la confiance entre l’État, les assurés et les caisses».
20 Minutes, Jérôme Faas
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